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L’Institution du Médiateur du Royaume : Modèle moderne d’un héritage historique de traitement des doléances (Wilayat Al Madhalim)

L’Institution du Médiateur du Royaume : Modèle moderne d’un hérit...

De Wilayat Al Madhalim à l’Institution du Médiateur, quoi de neuf ?

Il ne vous échappe pas sûrement que l’Institution du Médiateur du Royaume  ou  Diwan  Al  Madhalim  est  en  fait  la résultante d’un contexte national et international. Le temps ne permet pas peut être d’éclairer largement  les aspects institutionnels et juridiques liés aux circonstances de sa création, mais abstraction faite de la dénomination (Diwan Al Madhalim ou Médiateur) la création  de  l’I.M.R  reste tributaire du contexte islamique lié intimement à la philosophie  qui  a  présidé  auparavant  à  la  mise  en  place   de Diwan Al Madhalim. Elle concrétise, à travers diverses  étapes successives, la prise en considération des évolutions enregistrées dans le rapport du citoyen avec l’autorité.

Elle traduit, par ailleurs, l’attachement profond, mais néanmoins éclairé, à l’héritage culturel national, ainsi que l’ouverture sur les valeurs du patrimoine humain, tout en tenant compte de l’exigence permanente de modernité, avec  tout  ce  que  cela  impose  en  matière  de  protection   des droits et de garantie des libertés sur la base de Justice, d’Equité et d’Egalité. Tout cela, bien entendu, dans un cadre systémique, harmonieux, propre à l’élaboration d’un modèle institutionnel conforme à de nouveaux concepts et approches.

Hormis  le  Bureau  de  recherches  et  d’orientation,  créé   dans les années 50 du siècle précédent, auprès du regretté  Souverain  feu  Mohamed   V   que   Dieu   l’ait   dans sa sainte  miséricorde,  chargé  de  recevoir  les  plaintes  portées    à    l’encontre    de     l’administration,     en     quête de redressement des torts, D.A.M représente le pas évolutif, décisif, institutionnalisant les attributions et  les  modes    d’intervention    selon     une     optique     moderniste et une approche de respect des droits. Sa création est intervenue  dès  l’accession  de  Sa  Majesté  le  Roi  que  Dieu  le garde, au trône de ses glorieux ancêtres. Par la suite, la création du l’I.M.R est venue exprimer la volonté de se conformer  dorénavant,   à   des   normes   organisationnelles   et fonctionnelles compatibles avec les critères et les expériences internationales observées dans ce même domaine.

Ceci pour en faire une Institution nationale, puis constitutionnelle, parmi les autres institutions et instances de protection des droits, des libertés et de bonne gouvernance.

 

Comment    expliquer    la    constitutionnalisation de l’I.M.R parmi les institutions et instances de protection des droits de l’Homme et de bonne gouvernance ?

Il ne faut pas perdre de vue que la création de l’I.M.R a  incarné, dès le départ, l’adhésion de notre pays aux grands chantiers   de   réformes   institutionnelles   et    de    défense des droits, l’un des jalons d’adoption du modèle sociétal, impliquant  le  renforcement  des  garanties  de  protection   des droits et des libertés liés aux prestations des services publics sur la base des principes de Justice et  d’Equité,  à  même de  relever  les  dysfonctionnements  administratifs  et  de promouvoir la  bonne  gouvernance  des  services  publics,  en tant qu’obligation nécessitée par les présupposés de la construction de l’édifice démocratique et du système des droits.

La création du l’I.M.R était donc induite par un arrière- plan juridique  mondial  impliquant  la  satisfaction  des  critères internationaux, notamment les principes de Paris concernant les institutions nationales de protection et de sauvegarde des droits humains.

Considérer  ainsi  l’I.M.R  parmi  les  institutions  et  instances  de protection des droits de l’Homme, et de  bonne gouvernance,  parallèlement  à   d’autres   institutions   vouées à cette même mission, revient à l’idée de considérer la protection  des  droits  humains  et  leur   défense   en   tant que système global et diversifié qui intéresse plus d’une institution. Leurs champs d’action se chevauchent et s’entrecoupent pour intéresser plus d’une institution. Ce qui distingue l’I.M.R des autres institutions  et  organismes de gouvernance et de protection des droits, c’est son rôle spécialisé dans la défense des droits en relation avec le secteur public et la bonne gouvernance de ses diverses composantes.

Cependant il est utile de noter, que si le domaine des droits humains est d’une construction horizontale cumulative, nous restons convaincus, que grâce à cette complémentarité, nous pouvons valablement gérer les dits chevauchements nés de la pluralité institutionnelle dans l’intérêt de l’être humain.

Comment expliquer cette transformation et quelle est la valeur ajoutée susceptible d’être apportée par l’I.M.R dans l’espace institutionnel national ?

Je pense que l’I.M.R, dans sa conception actuelle, est  le  résultat d’une évolution naturelle, en tant que prise en considération constitutionnelle du rôle qu’elle peut assurer en matière de droits. Nous parlons  donc  d’une  Institution  dont   la   quintessence   traduit   l’adhésion   responsable   à une  dynamique  de  réforme  continue,  depuis   D.A.M,   en tant qu’Institution nationale pour aboutir à l’I.M.R, en tant qu’Institution constitutionnelle, reflétant une orientation nouvelle  visant  l’appropriation  collective   des   mécanismes de prévention  et  de  défense  des  droits  en  vue  de  parvenir à une meilleure maîtrise des droits attendus des services publics. Ce faisant elle participe à leur élaboration et à leur rayonnement. Bien plus, elle tend à les appuyer lorsque l’administration  les  adopte   dans   une   vision   moderniste   et dans un attachement franc aux traditions nationales et à l’héritage culturel marocain, patrimoine commun de l’ensemble des citoyens.

L’Institution légifère en quelque sorte le droit d’exprimer les plaintes et les doléances.

Elle est la voix audible des catégories sociales dépourvues de voies et moyens de faire valoir leurs droits devant l’administration, dans une  approche  civilisée  et  un mécanisme alternatif à la justice pour le règlement des contentieux administratifs.

Son  apport  additionnel  réside  également  dans   le   fait qu’elle soutient et  coopère  avec  l’administration,  en  l’aidant à tisser des liens avec les citoyens  pour  le  traitement  de  leurs différends, de manière civique et transparente, sans gaspillage de fonds publics, en les considérant comme des partenaires dans le processus de développement.

En sorte, il s’agit de redonner confiance dans les institutions de l’État.

 

Concrètement, comment opère l’I.M.R dans le contexte national ?

Nous  vivons  dans   un contexte national général, reposant sur une volonté résolue de poursuivre les  grandes réformes, en toute responsabilité, audace et perfectionnement,     comme l’ont exprimé à maintes reprises les discours royaux et plus particulièrement le processus d’élaboration d’un nouveau modèle de développement que les marocains  s’approprient eux-mêmes et s’engagent collectivement   pour   son succès aux fins d’améliorer leurs conditions de vie et  réduire les écarts sociaux et territoriaux.

A cet égard, je peux vous affirmer que l’I.M.R est au cœur de ce contexte, à travers une vision nouvelle, déclinée dans son programme stratégique 2019-2023 constituant le sous- bassement d’une action claire pour une approche intégrée, fondée sur des intervenants coordonnés et des objectifs complémentaires, afin de parvenir à la levée des obstacles entravant la gouvernance administrative, rechercher des solutions adéquates aux problèmes économiques et sociaux relevés dans la gestion de la chose publique, et pour s’intéresser aussi aux préoccupations citoyennes d’améliorer le secteur public en vue d’offrir des services essentiels de qualité, avec davantage d’engagement, de responsabilité et de bonne gouvernance.

Quels sont les atouts dont dispose l’I.M.R, ou en  d’autres termes, comment pourriez-vous persuader le citoyen de recourir au Médiateur, au lieu de s’adresser à la Justice ?

Je  crois  que  le  recours  à  l’I.M.R  n’est  pas  un  sujet  qui       la concerne en tant que telle elle seule, c’est plutôt une affaire sociétale exigeant l’adhésion de tous. Les solutions  consensuelles  basées   sur   les   règles   de   Justice  et d’Equité visent à faire valoir une logique de « gagnant – gagnant », (Win – Win) concernant toutes les catégories et composantes sociales. De notre point de vue, pareilles solutions sont préférables aux autres issues possibles.

On peut citer, à titre indicatif et non exclusif, quelques avantages du recours à l’I.M.R :

  • La souplesse, la gratuité, et l’éloignement des complications des procédures et des mesures ;
  • La Multiplicité et la diversité des moyens de communication et de recours à  l’intervention  de l’Institution ;
  • Des Mesures multiples et simples pour obtenir son concours et sans condition de recours préalable ;
  • La mise en œuvre des principes de Justice, d’Equité et d’Egalité ;
  • La saisine de l’I.M.R, pour la première fois, interrompt les délais de recours et suspend le délai de prescription ;
  • L’Extension régionale et locale de l’I.M.R par le biais des délégations régionales et locales.

Vous-avez évoqué la dimension  internationale  de la médiation institutionnelle, quelle est donc votre appréciation de la place de l’I.M.R parmi les institutions équivalentes dans le monde ?

L’observateur attentif de la promotion constitutionnelle acquise par l’I.M.R dans sa conception actuelle, peut distinguer, sans grande difficulté, qu’elle répondait objectivement à la nécessité d’accompagner le  modèle  indicatif de la médiation institutionnelle de par le monde.

On peut, à cet égard, assurer que l’I.M.R constitue par son positionnement dans le paysage international, dédié à la médiation institutionnelle, un  élément  actif  de  coordination et de concertation entre les institutions similaires pour l’adoption  des   meilleures   pratiques   opérationnelles   grâce à sa présence assidue dans les réseaux internationaux et régionaux à objet identique.

L’I.M.R préside actuellement l’Association des Ombudsmans et Mediateurs de la Francophonie (A.O.M.F) et  elle  est  membre  de  l’Institut  International  de  l’Ombudsman  (I.I.O)  et de l’Association des Ombudsmans de la Méditerranée (A.O.M).  Elle  fait  également  partie   du   bureau   directeur   de l’Association des Ombudsmans des pays membres de l‘Organisation de la coopération Islamique (O.C.I.).

Quelle est la contribution additionnelle que peut apporter l’I.M.R, en tant que destinataire des plaintes ?

Permettez-moi au préalable, de clarifier une question revêtant, à mon avis, une grande importance, afin de bien comprendre les attributions de l’I.M.R.

Il est exact que sa mission est de recevoir et de traiter les doléances, de procéder aux enquêtes et investigations à  leur  sujet,  de  mener  la  médiation  et   la   conciliation  entre l’administration et ses usagers, de promouvoir la communication entre eux, de participer à la consolidation des principes  de  gouvernance  administrative  grâce  à  la  force de proposition de réforme  dont  elle  est  dotée…  mais on ne doit pas tout autant occulter le fait que depuis sa  création dans  sa  version  initiale  de  D.A.M,  Sa  Majesté  le  Roi a voulu qu’elle  ne  soit  pas  un  simple  organe  d’appui  aux instances chargées de la protection des droits des citoyens, mais  bel  et  bien  une  Institution  habilitée  à  corriger  les   dysfonctionnements,   de   redresser   les   torts   et les abus pouvant atteindre ces droits, pour en faire donc une Institution incarnant par son rôle, l’attention royale accordée la promotion de la communication de l’administration avec les citoyens dans la  stricte  observance des règles de la primauté du droit et de l’Equité.

Nous ne devons pas oublier que cette  Institution  constitue  l’un des principaux appuis à l’importante évolution de réforme enregistrée  par  le  Royaume  durant  cette période, à partir de ses efforts de rendre perceptible le nouveau  concept  de  l’autorité,  en  le  mettant  au  service   du développement et du citoyen, à sa proximité et en tant qu’observateur Vigilant du respect des normes de la primauté du droit et de l’Equité.

Au regard des différends existant entre le citoyen et l’administration, il est permis  de  dire  que  l’I.M.R  constitue  un système de régulation des  équilibres  de  fonctionnement de l’appareil exécutif et administratif. Elle exerce un contrôle d’orientation en vue de conduire l’administration à assurer une gestion saine et à promouvoir une action performante.

Ceci bien entendu, parallèlement aux contrôles traditionnels exercés par les organes existants, et ce, par le biais  des  recommandations  et  des  propositions  de  règles   de bonne gestion à faire valoir pour élever la qualité des prestations et mettre fin aux pratiques contestables.

 

Au vu de l’élargissement de ses compétences, l’I.M.R est-elle compétente pour examiner les doléances liées à des décisions judiciaires ?

Certes les attributions de l’I.M.R couvrent les diverses doléances  portant  préjudice   à   des   personnes   physiques  ou morales, marocaines et étrangères en raison de  l’agissement  de  l’administration,  d’une   décision   implicite  ou explicite et tout acte contraire à la loi ou aux principes de Justice et d’Equité. En sont donc exclues trois sortes de questions :

  • Les doléances relatives aux affaires soumises à la Justice, et celles visant la révision des décisions de Justice ;
  • Les affaires devant légalement être soumises à des commissions spécialisées avant de saisir la Justice ;
  • Les questions relevant de la compétence de l’une des institutions de  protection  et   de   promotion   des   droits  de  l’Homme  ou  des   instances   de   bonne   gouvernance  et de régulation prévues aux articles 161 à 167 de la constitution.

En dépit de ces restrictions et en raison de la présence es-qualité du Médiateur au Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire, en vertu de la constitution et du texte constitutif dudit Conseil, l’I.M.R figure donc parmi les Institutions et Instances constitutionnelles  habilitées  par  la  loi  organique  du  Conseil  à   préparer   des   rapports   sur   la   situation   de  la magistrature et l’état de la Justice dans notre pays. Il m’appartient de ce fait, de préciser et de clarifier les choses à propos des rapports de l’I.M.R avec le pouvoir judiciaire et     le  fonctionnement  des  juridictions  d’une  manière  générale.

Les tribunaux sont des organes publics produisant et offrant des prestations de justice d’où la distinction à faire d’une part, entre l’activité  propre  à  leur  domaine  et  leur devoir inhérent d’autonomie et d’indépendance, et  d’autre part, les prestations administratives offertes pour accompagner leur activité, assumées d’ailleurs par leur département ministériel chargé de la justice, à l’instar d’autres compartiments administratifs, comme la garantie de l’accès et  le  droit  à  des  prestations  administratives,  les conditions d’accueil, la simplification des procédures, l’obtention de certains documents dans des délais raisonnables.

De ce fait, les juridictions ne différent pas des autres organes de l’Etat  et  par  voie  de  conséquence,  il  est  permis à l’I.M.R d’étendre ses attributions au traitement  des  doléances reçues  à  leur  propos,  tout  en  gardant  à  l’esprit  la spécificité du secteur et les interférences possibles ou probables entre ce qui est purement administratif  et  ce  qui est judiciaires dans une plainte donnée.

Par ailleurs, et dans le cadre de la relation de l’administration avec ses usagers, l’I.M.R assure la défense des droits en cas de préjudice dû à certains agissements administratifs malencontreux, comme par exemple le refus d’exécution des jugements définitifs.

L’I.M.R peut donc intervenir pour   amener   l’administration  à    reconsidérer    sa    position  et  faire  droit   à   l’autorité   de la   chose   jugée,   en   utilisant les      mécanismes       prévus  par la législation à cet effet, notamment    s’il    s’avère    que le refus de l’administration d’exécuter la décision judiciaires  est   imputable   à  une attitude injustifiée d’un responsable, fonctionnaire ou agent qui en dépendent.

Elle peut en pareil cas  adresser  un  rapport  spécial  au  Chef du Gouvernement après en avoir avisé préalablement l’autorité gouvernementale ou le chef de l’administration concernée   pour   prendre   les   mesures    appropriées    et    les sanctions disciplinaires nécessaires à l’encontre de l’intéressé.

On peut également faire à l’administration concernée une recommandation  pour  engager  une  poursuite   disciplinaire ou le cas  échéant  transmettre  le  dossier  au  Ministère  public afin de prendre des mesures prévues par la loi tout en informant le Chef du Gouvernement.

En  tout  état  de  cause,  et  pour  revenir  à  votre  question  sur l’extension des compétences de l’I.M.R, je ne veux pas que l’on réduise la question  des  compétences  au  simple  angle étroit de l’application rigoureuse des mesures administratives ; bien au contraire, on peut plutôt voir dans la médiation institutionnelle le moyen d’offrir une nouvelle opportunité.

Concrètement, comment procède-t-elle dans pareils cas ?

Nous devons d’abord admettre qu’en vertu de la loi que la mission de l’I.M.R en tant qu’Institution de médiation est :

  • de redresser le tort subi par le plaignant  en  raison  d’un abus ou d’un agissement administratif empreint d’injustice, voire d’une application malveillante d’une disposition légale ;
  • d’améliorer la communication entre les citoyens et l’administration ;
  • de renforcer leur confiance réciproque et de maintenir la crédibilité des organes.

Je pense donc que ces fonctions (et non  les  attributions  stricto sensu) appuient la paix sociale qui représente à mon sens et synthétise la  plupart  des  objectifs  du  plan  onusien  du     développement     durable,     adopté     par     notre   pays.

Ceci grâce aux démarches amiables et à la médiation conciliatrice    que    l’I.M.R   peut engager afin de rapprocher les positions respectives des deux parties du litige pour parvenir à des solutions acceptables par tous, de manière à éviter à l’Etat la perte de chances de développement.

A mon avis, le fait de considérer les compétences de l’I.M.R sous cet angle, conformément à son cadre, réfèrent avec tout ce que lui permettent les principes de Justice et d’Equité, doit nous éloigner de son appréciation courante en tant que simple bureau des plaintes (réception et traitement) pour plutôt la distinguer en  tant  qu’Institution  opérationnelle  et  active  dans la réalisation des objectifs de développement, un contributeur effectif au renforcement des principes de gouvernance éclairée, agissant pour que les textes de loi n’engendrent point d’injustice dans leur énoncé ou  lors  de  leur   application,   acteur   d’amélioration   du   fonctionnement de l’administration et de la qualité des prestation publiques, facilitateur de la proximité des citoyens et facteur d’évolution du système de gouvernance grâce  au  règlement  des  litiges, les propositions et les recommandations opportunes.

Tout cela sans occulter évidemment le rôle de l’Institution dans la promotion de la communication entre l’administration et le citoyen en vue d’offrir la possibilité de rebâtir une culture de dialogue, de confiance et de conciliation, de promouvoir les relations entretenues à cet égard pour appuyer la crédibilité des institutions de l’Etat et élargir le champ de la justice sociale.

Ce sont là des objectifs qui participent à l’instauration de la stabilité, la cohésion sociale et la consolidation de l’Etat de droit. Il va de soi que ces objectifs impactent fortement la vie courante des citoyens.

Quel est d’après vous, le rôle de l’Institution dans  le renforcement de la bonne gouvernance, le rayonnement des principes de transparence et de moralisation du Secteur Public ?

Il est bien admis aujourd’hui  que  l’Institution  du  Médiateur du Royaume, est une structure constitutionnelle de bonne gouvernance ouvrant aux citoyens le droit de contester et de revendiquer son  intervention  pour  le  bon  dénouement  de leurs contentieux administratifs, et cela grâce aux attributions dont dispose le Médiateur pour exiger de l’Administration  l’observance  scrupuleuse  de   l’application  de la loi et la réalisation de l’Equité. Elle joue, en effet, un rôle essentiel dans la mise en œuvre pondérée de la gouvernance administrative  et  son  corollaire  objectif,  celui de la reddition des comptes des entités administratives responsables.

En conséquence, nous croyons que les questions de bonne gouvernance offrent un réceptacle de bonnes pratiques telles que la transparence, la reddition des comptes, la consolidation  de  la  primauté  de  la  loi,  la  mise  en  œuvre  de la décentralisation et  de  la  régionalisation  etc…  puisque ce sont là des aspects qui figurent parmi les domaines d’action dévolus au Médiateur ou interférant avec ses interventions et qui illustrent aisément son rôle, par rapport aux questions, que vous évoquez, en raison du lien évident entre la bonne Gouvernance et la protection des droits. De manière générale, les Institutions  de  médiation  sont considérées comme étant les mieux indiquées pour connaître  parfaitement  du  domaine  des   droits   individuels et collectifs, leur interaction ou parfois leur  incompatibilité avec les pratiques administratives.

Je peux donc affirmer que l’Institution du Médiateur du Royaume  est  bel  et  bien  habilitée  à  gérer  la  dialectique  des  droits  et  des  devoirs  dans  le  cadre  de  la   relation  entre  le  citoyen  et  son   administration.   Ainsi   et   lorsque  les conditions de la bonne gouvernance sont réunies,  les  droits des citoyens sont mieux assurés et protégés des errements administratifs inconsidérés.

Quelle est votre appréciation des moyens d’intervention de l’Institution du Médiateur du Royaume pour le traitement des affaires dont elle est saisie ?

Personnellement,  je  considère  que  l’Institution   du Médiateur du Royaume dispose de  mécanismes  d’intervention multiples et légalement suffisants comparativement au reste  des  Institutions  équivalentes.  Mais,  je   pense   que   pareille   interrogation   doit   dépasser  la simple appréciation des mécanismes disponibles  pour  cerner la capacité  de  les  mettre  en  œuvre  surtout  lorsque  le système administratif admet difficilement l’intrusion de la médiation institutionnelle dans ses rouages habituels.

A l’exception de la réception et du traitement des plaintes et des doléances, l’enquête et l’investigation, l’initiative spontanée,   mécanismes   que   l’Institution   du   Médiateur  du Royaume peut d’elle-même mettre en œuvre, d’autres moyens dépendent par contre, des prédispositions de l’administration concernée à consentir à leur application. Il s’agit ici des demandes  de  règlement  amiable,  l’avis  requis de l’Institution du Médiateur du Royaume sur  les  questions que lui soumet l’administration intéressée, sa consultation sur les projets et programmes préparés par les administrations en vue d’améliorer leur fonctionnement, l’avis à donner sur les projets de lois et la discussion de son rapport annuel devant le parlement etc…

Nous devons nous persuader et prouver que le  Médiateur  n’est pas un simple décor meublant  l’espace  institutionnel  des droits. Le devoir nous impose d’être à la hauteur, de la place constitutionnelle qui nous a  été  décernée,  et  de  faire en sorte que les rapports  administration  –  usagers  soient  plus productifs d’effets. Une administration qui assimile et admet  les  raisons  qui  ont  présidé  à  la  création  de  l’I.M.R,  une administration citoyenne au service  du  citoyen  et  du développement. La réussite de la mission de l’Institution ne  dépend  pas  uniquement  des  moyens  d’intervention   dont elle dispose mais aussi et surtout  de  sa  coopération  avec l’administration et de la bonne perception par celle-ci des  tenants  et  aboutissants  de  sa  mission  de  médiation.  Car les solutions restent en dernier lieu entre les mains de l’administration et non dans celles du Médiateur.

Vous avez eu récemment une séance de travail avec la Commission du modèle de développement, quels ont été les axes abordés avec ses membres ?

Tout ce que je pourrais vous dire au sujet de cette rencontre est qu’elle s’est tenue  dans  une  ambiance  de bonne compréhension. Nous avons trouvé auprès de son Président et de ses membres une écoute attentive et tout l’intérêt escompté pour notre opinion sur cette démarche.

Nous lui avons remis une note explicative de notre vision du nouveau modèle de développement, que je ne peux détailler maintenant avec vous, et tout ce que je peux vous dire c’est que de  notre  point  de  vue,  et  comme annoncé  précédemment,  la   question   du   rapport   de   l’I.M.R avec  le  nouveau  modèle  de  développement  est  d’une grande acuité, si on  prend  en  ligne  de  compte  son  rôle d’observation et de correction des comportements administratifs inappropriés, incompatibles avec  les opportunités de développement.

Elle constitue une force de proposition  de  réformes législatives, judiciaires et administratives. D’où sa  grande utilité. Son rapport annuel d’activité présente un diagnostic réaliste et objectif des lacunes administratives et des agissements préjudiciables aux usagers, avec leur lot de répercussions nuisibles aux occasions offertes. Les divers dysfonctionnements liés à la gouvernance des services,  décelés au cours du traitement des affaires attestent leur impact négatif sur  le  développement  économique  et  social, et retardent bien  évidemment  la  réalisation  du  modèle  social auquel nous aspirons ensemble.

Elle doit être entendue au plan de l’incidence du fonctionnement administratif sur la visibilité de l’Etat, en tant que  pourvoyeur  des  chances   réelles   de   développement,  de prospérité sociale, en garantissant aux citoyens la jouissance de leurs droits politiques, civils, économiques, sociaux et culturels, et en établissant les conditions de la paix sociale.

Dans le même contexte, on ne doit pas perdre de vue qu’à travers l’action de l’I.M.R, elle aide à mettre en lumière les besoins réels des administrations en moyens. Tout ceci est de nature à renforcer sa position et sa crédibilité dans la conception du modèle de développement en raison de sa capacité de faciliter une relation confiante avec les citoyens et d’aider au  rayonnement  des  valeurs  de  moralisation  et  de transparence.

Ce sont là des principes à dimensions sociale et économique figurant d’ailleurs parmi ceux du développent durable. Le rapport de l’Institution du médiateur du Royaume avec ce dernier concept doit  être  également  observé  au  niveau  de  la justice sociale, par le respect de la primauté de la loi et l’observance des principes de Justice, d’Equité et d’Egalité.

Nous sommes convaincus que le rapport entre l’action de l’Institution du Médiateur du Royaume et le développement durable est plus que probable, il est sûr et certain.

Vous avez assisté dernièrement au Caire à une rencontre sur « le Gouvernement Ouvert ».

Pouvez-vous éclairer le lecteur sur le rôle qui incombe à l’Institution du Médiateur du Royaume, à ce sujet ?

A vrai dire, l’Institution du Médiateur du Royaume réfléchit déjà  sur  le  programme  de  l’ouverture   du   gouvernement sur la société.

Elle a été parmi les institutions qui ont proposé d’importantes mesures, comme la création d’un site national d’intégrité, agissant alors à côté de l’Instance Centrale de Prévention de la Corruption, ainsi que l’amélioration des structures d’accueil des administrations publiques.

Certes, elle  n’est  pas  pour  l’instant  membre  de  l’Instance  de supervision du programme, et donc non concernée par l’exécution d’une quelconque obligation selon la version finale annoncée par le gouvernement. Décision que nous respectons, mais cela n’empêche pas l’Institution du Médiateur du Royaume de maintenir son droit d’exercer pleinement les rôles qui lui sont dévolus à cet égard. L’Organisation de Coopération et de Développement Economiques (O.C.D.E) avait précédemment d’ailleurs souligné l’engagement de beaucoup de gouvernements pour cette ouverture, dont notre pays, et ce, en associant les Institutions d’Ombudsman en tant que mécanismes  de coordination des politiques et des initiatives liées à cet objet.

Ce qui milite en notre faveur, c’est notre proximité supposée  des  citoyens  et  notre  appréhension  des  problèmes concrets qu’ils  vivent  au  quotidien,  d’où  la  part de  responsabilité  qu’on  peut   prendre   dans   la   prévision  de la relation du citoyen avec le gouvernement ouvert, et surtout à cause de l’identité et  de  l’unité  des  objectifs  et  des principes communs aux institutions de médiation et aux gouvernements, à savoir l’intégrité, la gouvernance, la transparence et la moralisation.

Les données statistiques disponibles montrent des divergences entre les intervenants devant  cette  problématique :

  • 15% ont participé à la préparation des stratégies du « gouvernement ouvert » sur son environnement ;
  • 13% parmi les mécanismes nationaux de coordination ;
  • 26% ont un rôle de contrôle du respect des engagements pris en la matière.

Nous  devons  donc   nous   convaincre   et   également   prouver que le Médiateur constitue l’un des mécanismes d’observation et de contrôle des stratégies du « gouvernement ouvert » et des actions engagées à cet effet en raison de son influence sur la relation productive entre l’administration et le citoyen, au regard de son indépendance, de son impartialité et de sa capacité à relever les dysfonctionnements administratifs éventuels.

Nous apprécions les efforts déployés pour l’adhésion du Maroc à l’initiative du partenariat pour un « gouvernement ouvert », tout en affirmant en même temps que l’Institution continuera d’accomplir son rôle dans le suivi de l’application des principes de cette  initiative  ainsi  que  dans celui de l’exécution du plan d’action national annoncé dans ses cinq volets et ses dix-huit engagements. Nous n’épargnerons aucun effort pour faire connaître les politiques et les initiatives prises par  notre  pays  dans  ce  sens. Nous sommes persuadés que notre rôle ne réside pas dans la simple dénonciation des erreurs, mais plutôt et surtout, celui d’offrir un accompagnement d’orientation de l’administration dans la mise en œuvre des politiques publiques.

Doit-on déduire de vos propos que l’I.M.R exerce un contrôle sur l’action gouvernementale ?

L’I.M.R dispose d’attributions claires qu’elle entend exercer dans le cadre d’un système normalisé internationalement.

Si vous voulez donc user du terme « contrôle », je souhaite qu’il  ne  soit  pas  compris  en  dehors  de  nos  attributions,  et nous nous abstenons d’ailleurs de l’évoquer, car contrairement au contrôle vertical exercé par le Parlement et autres organes de contrôle, et contrairement aussi au contrôle judiciaire exercé en vertu de la Constitution, il est communément admis que le Médiateur exerce une sorte de contrôle de nature réflexive ou
« Soft Control », ce que, pour notre part, nous appelons contrôle d’accompagnement et d’orientation (de nature horizontale) ou en d’autre termes un contrôle de redressement, qui fait de l’I.M.R un auxiliaire de l’administration et un coopérant utile pour la recherche de solutions appropriées aux problèmes
dont elle est saisie, tout en garantissant sa gouvernance dans la gestion des affaires des usagers, en réagissant
également et promptement devant les faits et évènements, persuadée de la nécessité de rendre justice à qui de droit, l’usager ou l’administration, même si le citoyen reste le maillon faible de cette relation, en exerçant aussi une action préventive de la survenance d’actes préjudiciables aux droits afin d’obtenir les résultats espérés, au moyen du règlements amiables, l’élaboration de rapports, de recommandations et de propositions, etc. Naturellement, elle ne peut pas être dans ces conditions, le contrôleur attitré de l’administration, dans l’acception classique du terme.
J’affirme, une fois encore, que l’I.M.R doit être par sa fonction, le partenaire principal du gouvernement pour
la garantie des droits. Elle est directement concernée par leur défense de manière à satisfaire la demande de
tous, de prestations administratives publiques, de qualité acceptable, dans les domaines essentiels (santé,  éducation, sécurité, emploi, habitat, etc…).

A la faveur de la vision et des compétences que vous venez d’évoquer, quel est d’après vous, l’état de vos rapports avec l’administration, surtout lorsque vos recommandations sont considérées généralement comme de simples avis consultatifs, ne pouvant revêtir un caractère obligatoire évident, comme d’ailleurs l’a précisé la jurisprudence ?

L’Institution affronte souvent certaines contraintes qui l’empêchent d’exercer pleinement les rôles et les missions qui ont justifié sa création. Nous comprenons cet état de fait ainsi que ses motivations, mais nous pensons qu’il est appelé à disparaitre car il est représentatif à notre sens d’attitudes passives dans la phase du passage réel vers une considération plus consciente des rapports qui doivent exister logiquement avec les institutions de gouvernance et des droits de l’Homme, et des instances de régulation, dans leurs rôles constitutionnels et légaux.
Parmi ces attitudes, la déclaration répétitive du caractère non impératif de l’application des dites recommandations malgré leur réalisme et leur adéquation à certains cas difficiles, et en dépit de notre affirmation continuelle de leur obligation constitutionnelle, morale et éthique. Nous avons dit qu’il s’agit là d’un simple débat technique, sorti de son contexte, qui en fait une nouvelle version de l’effet et du débat relatif à la non-exécution des jugements et des décisions judiciaires. L’I.M.R soutient, à ce propos, fortement la levée des obstacles à la résolution sans équivoque de cette question.

Le débat concernant l’exécution ou l’inexécution des recommandations du Médiateur dans une société éprise des valeurs de démocratie et de droits humains, doit être envisagé dans l’optique de responsabilité politique,
sociale et administrative avant de rechercher les moyens susceptibles de rendre obligatoire leur l’application. D’ailleurs, dans tous les pays ayant adopté le système de médiation institutionnelle, et même en l’absence de texte le stipulant clairement, on reconnait volontiers le caractère moral de cette obligation d’appliquer les recommandations du Médiateur ou son équivalent.

Concernant le second volet de votre question, on doit garder à l’esprit quelques données essentielles :

  • Nous ne sommes pas devant une jurisprudence mais nous faisons face à une décision judiciaire que nous respectons par devoir constitutionnel et légal.

Cela n’empêche  pas  cependant  le  commentaire  sur  le plan scientifique ou un avis juridique sur la conclusion retenue par la justice.

Ladite décision a été prononcée dans le cadre d’un texte de loi ancien et  à  propos  de  faits  précis  au  sujet  duquel un tribunal avait lors d’une précédente étape estimée que la recommandation revêtait un caractère obligatoire.

  • Bien plus la volonté du législateur exprimée dans la dernière mouture du texte de création de l’I.M.R diffère sensiblement de la décision judiciaire précitée, puisqu’il stipule clairement que l’administration est  tenue  de prendre en considération  la  recommandation  du  Médiateur relative à une doléance donnée, et qu’elle est tenue de l’informer des mesures pris par son  application ainsi que des motifs qui ont pu, le cas échéant, l’empêcher éventuellement, de le faire.

Nous    sommes    donc    face    à    de    nouvelles     données qui font obligation à l’administration d’appliquer les recommandations et de justifier éventuellement leur non application. Seule la justice est à même de contrôler  l’existence d’un tel motif et d’indiquer s’il est suffisamment probant.

Nous tenons toujours à  persuader   l’administration de la justesse de l’objet ayant nécessité    la    formulation  d’une  recommandation, sans toutefois parvenir à la réaction   positive   attendue. Bien au contraire, on nous oppose  un   argument approximatif ou le doute sur cette force obligatoire au  lieu  de faire l’effort nécessaire de trouver  une   solution   juste   aux problèmes soulevés. L’administration qui hésite ou refuse, aurait dû quand même prendre en considération la nature constitutionnelle de l’Institution pour s’imprégner davantage de l’intérêt de ses recommandations et de ses propositions,  et   partant   de leur caractère obligatoire, du moins moralement.

Vous avez publié dernièrement votre rapport annuel qui contient un ensemble de données relatives aux plaintes des citoyens.

Quelle est votre appréciation des résultats qui y figurent ?

Effectivement, le rapport a été publié au B.O conformément aux stipulations de la loi, et ce après l’avoir soumis à Sa Majesté le Roi que Dieu le garde.  Ce  rapport  concerne l’activité de l’Institution durant la période précédant ma nomination à cette charge.

Parmi ses points forts, il y a le résumé de l’étude que nous avons mené sur l’évaluation du fonctionnement de l’I.M.R avec quelques données caractérisant son action depuis 2011, et jusqu’en 2018, persuadés du droit de l’opinion publique d’avoir une vision claire sur le bilan d’activité de cette Institution.

Quelles sont les conclusions qui ont été retenues dans le rapport ?

Le rapport offre au niveau statistique des données chiffrées sur le bilan d’activité de  l’I.M.R  en  matière  de  traitement  des doléances au cours de l’année 2018, et dont le total a atteint 9865 plaintes, avec une augmentation de 5,19% par rapport à 2017, même si le total des plaintes relevant de sa propre compétence ne dépasse pas les 2738 plaintes, soit 27,8% du total reçu.

Quelle est votre lecture de ces plaintes ?

Préalablement  on  notera  que  le  rapport  comporte  un

ensemble d’analyses à partir de la qualité et de la nature des auteurs des dites plaintes. Il a montré que les  personnes physiques  ont  représenté  la plus grande part des saisines, c’est-à-dire 80,3% du total reçu

Elles              sont              suivies successivement   par   les  groupes d’individus, et les personnes morales. La part revenant aux femmes a été de 24,7% avec un taux moyen d’augmentation annuelle de 8,6%, alors que celui relatif aux doléances masculines n’a été que -0,36%.

Le rapport présente également une répartition des plaintes  selon les départements administratifs  concernés,  tout en remarquant que leurs parts respectives ne reflètent pas nécessairement   l’importance des      dysfonctionnements existant réellement dans leurs secteurs respectifs, car toutes les plaintes ne traduisent pas obligatoirement  le  degré  de  leur responsabilité dans les dits dysfonctionnements. Le révélateur réel de leur existence dans le traitement des dossiers dans chaque secteur administratif, c’est plutôt le nombre de recommandations émises à leur propos après l’échec des tentatives de trouver un terrain d’entente acceptable pour dépasser le différend, le litige voire l’obtention d’un droit.

Le fait nouveau qui mérite d’être signalé en dehors des classifications sectorielles habituelles, c’est celui du rang avancé occupé dorénavant par les collectivités territoriales  dans  le  classement  des  plaintes  reçues  à   leur   encontre, soit un total de 267 plaintes, d’où le quatrième rang du  tableau de répartition avec 9,75% du total enregistré durant l’année en cause.

Le rapport offre, par ailleurs, une répartition géographique des plaintes et  doléances,  faisant  apparaitre  la  région Tanger, Tétouan AL Hoceima en tête de liste avec 17,8% du total des affaires reçues.

Quels sont les domaines ayant enregistré le plus de dysfonctionnements objet des plaintes des citoyens ?

Le rapport comporte aussi une répartition des plaintes, en fonction de leur objet, pour distinguer quatre catégories d’affaires :

  • Celles à caractère administratif, en haut du tableau avec 60,2% du total de l’année ;
  • Puis celles à caractère financier ;
  • Celles à caractère foncier ;
  • Enfin celle relatives à la non-exécution des jugements prononcés à l’encontre de l’administration.

Le reste des affaires non classées figure dans la rubrique « divers ».

Quelle est votre appréciation de l’interaction des administrations publiques avec les interventions  de l’I.M.R sur le plan du traitement des plaintes des citoyens ?

Puisque nous parlons du rapport de l’année 2018, je peux vous affirmer que le pourcentage des affaires réglées définitivement durant cette année n’a guère dépassé les 22,75%, pourcentage somme toute assez modeste au vu des attentes et des aspirations les concernant.

La position de certaines administrations est honorable en raison  de  leur  prédisposition   à   satisfaire   équitablement   les demandes des requérants. Par contre, celle d’autres administrations, elle est à déplorer, ce qui se répercute négativement sur la situation des plaignants, victimes d’errements, et affaiblit le degré de confiance dans les organismes publics avec  naturellement  le  sentiment d’injustice de l’usager.

Nous    restons    cependant    optimistes.     Nous     espérons   et nous prévoyons que ce pourcentage  de  règlement  favorable des dossiers s’améliorera  l’année  suivante  (2019)  au vu des bonnes intentions affichées par la plupart des administrations publiques concernées.

Pouvez-vous éclairer le lecteur sur le genre de dysfonctionnements et lacunes entravant la relation administration – citoyen ?

Le rapport 2018 cite bon nombre de dysfonctionnements :                                                                                                            

 

  • Soit à caractère horizontal concernant un ensemble de secteurs, comme le dysfonctionnement engendré par la dernière restructuration gouvernementale et la lenteur de mise en œuvre de la déconcentration administrative ;
  • Ou à caractère vertical, concernant des secteurs spécifiques. Je peux vous en citer brièvement :
    • L’atermoiement dans l’exécution des jugements rendus à l’encontre de l’administration ;
    • Le non-respect de la procédure légale d’expropriation pour cause d’utilité publique ;
    • La gestion approximative des programmes d’habitat social ;
    • L’apurement des marchés publics et des bons de commande ;
    • La lenteur de la réforme du régime de retraite ;
    • Les erreurs dans la gestion des situations administrations individuelles ;
    • La mauvaise gestion des plans d’aménagement ;
    • Les défaillances dans la couverture médicale ;
    • La non application des arrêtés et décisions

A cette occasion, j’insiste auprès de toutes les parties concernées pour adopter un rééchelonnement  réaliste capable de mettre fin à ces pratiques, tel que cela a été détaillé dans les recommandations qui leur ont été adressées auparavant.

A propos de recommandations, comment jugez-vous le degré de réactivité des administrations publiques avec les recommandations de l’I.M.R au sujet des plaintes des citoyens durant cette même année ?

Je voudrais signaler, avant toute chose,  que  contrairement  aux données annuelles concernant l’activité de l’Institution au niveau de l’enregistrement et du traitement des plaintes,     le sujet de ces recommandations revêt  un  caractère particulier puisque le nombre annoncé est cumulatif, c’est- à-dire qu’il englobe l’année objet du rapport (2018) mais aussi les années antérieures.

Il a fallu donc, pour avoir une idée exacte de l’attitude des administrations à propos des recommandations de l’I.M.R, inventorier  toutes  celles  qui  leur  ont  été  faites,  tant  que   le plaignant n’a pas encore recouvert ses droits légitimes.

Cette explication me paraît nécessaire pour justifier le nombre inscrit dans le rapport d’activité 2018, soit un total de 1941 recommandations, représentant 11% du total des plaintes correspondant pleinement aux attributions de l’I.M.R, à savoir 17373 plaintes reçues depuis 2011.

Abstraction  faite  des  répartitions  thématiques   et  sectorielles des dites recommandations émises  par  l’Institution et qui ne diffèrent pas beaucoup de celles des   plaintes   comme   dit   précédemment,   la   position   et   le comportement de l’administration vis-à-vis de ces recommandations  sont  illustrés  par  le   pourcentage   de celles mises réellement en application, ajoutées à celles dont la non application parait bien fondée juridiquement,soit environ 804 recommandations. D’où un pourcentage d’application à fin 2018 dans les limites de 41,42%, par contre celles non appliquées s’élèvent à 1137 soit 58,57% du total émis.

Peut-on considérer que ce pourcentage reste en fin de compte faible et que par conséquent son impact sur le citoyen reste nécessairement limité, voire insuffisant, à cause du manque de réaction positive de l’administration ?

Il est vrai que l’attitude négative de certaines administrations    à  propos  des  recommandations  de  l’I.M.R  est  susceptible  de  creuser  davantage  le  fossé  avec  leurs  usagers  et  ne peut que les desservir en fin de compte, surtout en ce moment précis, caractérisé par l’accord  consensuel  de parvenir à une réconciliation concrète avec les usagers et d’éloigner le sentiment quasi  unanime  de  non  satisfaction  des services publics.

Pour ce faire, l’Institution espère, en présentant les résultats   des   rapports   soumis   à   Sa   Majesté   le    Roi,  faire la lumière sur cet état de choses, en publiant  les  données statistiques exprimant partiellement la réalité des rapports administration-usagers et susciter ainsi une réflexion commune des intervenants pour que la médiation institutionnelle ne soit pas  perçue  comme  un simple décor  institutionnel,  condamné  à  la  marginalisation  et à la déception de l’opinion publique. Le succès de l’Institution ne doit pas se  limiter  à  observer  et  inventorier les dysfonctionnements.

Au contraire, il doit se traduire concrètement  par  le  niveau des  solutions  obtenues  avec   l’ensemble   des   acteurs   de   la vie publique, pour mettre fin aux dysfonctionnements et accroître la confiance du public dans la médiation institutionnelle.

Nous estimons que  l’Institution  ainsi  que  l’administration sont appelées à tisser de nouveaux liens de coopération sur  la  base  du   principe   constitutionnel   et   du   contenu   de son texte de création, loin de tout égoïsme sectoriel, s’appuyant généralement sur l’exclusivité décisionnelle et la détention unilatérale de la vérité à partir d’une interprétation personnelle, qui n’est pas toujours indemne d’erreur ou non conforme aux principes de Justice et d’Equité.

Nous affirmons, une fois encore, comme on l’a répété à maintes  reprises,   que   la   médiation   institutionnelle   ne doit pas être perçue comme un adversaire, mais plutôt comme un partenaire, un auxiliaire, support de la bonne gouvernance revendiquée par l’administration. Le succès d’une partie rejaillira inéluctablement sur l’autre.

Ce sont là sûrement de grandes attentes de l’Institution, mais comment peut-elle les transformer en paris gagnants ?

Nous croyons, pour notre part, que les  succès  doivent  reposer sur les acquis engrangés. L’I.M.R a accumulé d’importants résultats au vu du nombre  des  doléances  réglées définitivement, des recommandations et des propositions émises sans oublier tout ce qu’elle a mis en exergue pour une application concrète du concept de l’Equité.

Ces résultats l’ont quand même aidé  à  préciser  sa  vision  pour améliorer son approche. Ils lui ont permis de fixer ses objectifs stratégiques, déclinés dans le plan général 2019-2023. La vision qui en découle repose sur l’idée que les  recommandations   et   les   propositions   doivent   être vues comme l’amorce d’une mise à terme des mauvaises pratiques. Notre action se fonde  sur  une  logique  toute simple.

Le règlement d’un problème doit servir à solutionner les problèmes identiques dans le cadre de l’accompagnement d’orientation.

L’objectif général fixé à cet égard est de valoriser la qualité du service offert au citoyen, et de lui permettre d’obtenir  ses  droits  légitimes,  faciliter   ses   relations   avec les  organes  publics  sur  la  base  de  la  bonne  gouvernance,  la transparence et l’égalité devant la loi et auprès de l’administration en se fondant sur six axes stratégiques :

  • Une Institution constitutionnelle orientée pour servir’usager par l’amélioration des conditions d’accueil et la facilitation de l’accès à ses services, assurer la proximité et l’obtention de l’information ;
  • Une gouvernance empreinte de professionnalisme et d’efficacité à partir de la réorganisation structurelle actualisée ;
  • La réhabilitation de ses ressources et l’élaboration de guides de travail référentiels, selon une approche nouvelle pour améliorer la qualité de ses prestations reposant sur l’évolution de la méthodologie de traitement de doléances afin d’obtenir une bonne réaction de l’administration vis- à-vis de ses interventions et ses recommandations ;
  • Le renforcement de la présence régionale de l’Institution dans le cadre de la déconcentration répondant aux besoins de la régionalisation avancée du Royaume ;
  • Une administration institutionnalisée adoptant les nouvelles technologies selon un plan informatique directeur, des systèmes performants de gestion des plaintes, avec une solide infrastructure technologique facilitant le service à distance ;
  • Appuyer la coopération et la communication avec les acteurs nationaux, les institutions équivalentes ainsi qu’avec les organismes internationaux à but

Les axes de ce plan comportent 23 programmes, 107 mesures d’application, et 162 critères d’évaluation de ces mesures en fonction de taux prévisionnels de réalisation répartis sur cinq années.

Quel est votre sentiment quant à l’avenir de la relation de l’I.M.R avec l’administration ?

Nous sommes pleinement confiants dans notre conscience et notre intelligence collective ainsi que dans nos efforts conjoints  pour  créer  le  climat  nécessaire  à  l’amélioration   de nos prestations et à la conduite de notre activité administrative conformément aux attentes du citoyen.

Nous  sommes  convaincus  de  notre  passage  à   une   nouvelle étape reflétant une meilleure prédisposition de l’administration vis-à-vis des interventions de l’I.M.R et de ses recommandations  en  établissant  des  relations  de  partenariat  conduisant  à   la   mise   au   point   de bonnes pratiques et au renforcement des canaux de coopération et  de  communication  sur  la  base  du  dialogue  et la concertation dans les diverses affaires soulevées susceptibles d’impacter défavorablement la fonction  du secteur public.

Nous    aspirons     à     parvenir     prochainement     ensemble   à un espace qui nous réunit pour la défense du droit, l’obtention des meilleurs services offerts aux usagers et la consolidation de la confiance dans l’administration et les institutions, animés en cela par le même désir et le même espoir  d’un  fonctionnement  administratif  public  meilleur   qui distingue et honore.

Ce qui a été d’ailleurs approuvé clairement par tous les participants à la rencontre organisée par l’Institution avec les interlocuteurs permanents dans les administrations et les établissements publics.

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